Il avait fait une connerie. Pas vraiment une grosse ou une impardonnable, mais c’était quelque chose qui était assez rare chez lui. Kyou avait tout de l’apparence d’un délinquant juvénile mais n’en était pas du tout, un. C’était quasiment le contraire. Il faisait très attention à ses actes et c’était sûrement le premier à aider une grand-mère à porter ses courses. Et s’il y a bien une chose qu’il évitait plus que tout, c’était la merde. Disons qu’il n’avait pas ce genre de fétiche surtout. Alors qu’est-ce qui faisait qu’il avait fait une connerie ? Et bien. Lui-même ne savait pas. Mais il en avait fait une et il était maintenant au commissariat. Bravo Takahashi. Super Takahashi. Waw, t’as géré Takahashi. Il se le répétait depuis qu’il est entré. Naturellement, il se rappelait de ce qu’il avait fait pour se retrouver là. C’était le ‘pourquoi’ qui l’intriguait, juste. En somme, il n’avait rien fait de si mal, à part le fait que son poing avait rapidement fait de sympathiser avec la joue d’un Yankee.

C’était une scène normale. Il marchait normalement quand un groupe de ce qu’on appelle affectueusement « bad boys » le bousculent et se retourne en lui demandant de s’excuser, lui. En temps normal, il passait juste son chemin. Chose qu’il avait décidé de faire à la base, jusqu’à ce qu’ils insistent. C’était ce qu’on aurait pu voir comme de la défense légitime. Mais ça ne l’était pas. Il les avait frappé en premier. Que ça soit, sous une impulsion -ce que lui-même jugeait impossible ou une envie soudaine -ce qui était encore plus inimaginable venant de sa part, il avait décidé de faire connaissance ... pas de la meilleure manière, certes. Une partie de lui était en colère contre lui-même, tandis que l’autre ressentait une satisfaction malsaine de ce qu’il avait commis. Il avait encore la sensation entre ses doigts, le gémissement du garnement à ses oreilles, même s’il avait vite fait d’être pris en otage, avant que la police n’intervienne. (Merci mamie commère de sa fenêtre.)

Pour résumer, Kyou saignait de la lèvre, avait des bleus sur tout le corps et ne pouvait s’empêcher de retenir un râle à chaque mouvement, mais il était heureux. Non, il ne regrettait rien. Bien sûr, il se posait encore des questions sur pourquoi, il avait fait ça. Bien sûr, ça l’obsédait au fond. Bien sûr, il connaissait plus que quiconque la réponse. Mais bien sûr ... Il voulait juste oublier.

C’était l’heure de partir. Il vit un des agents qui l’avaient arrêtés plus tôt, traverser le seuil de la porte de détention. Il lui jeta un regard puis se redressa, pour sortir naturellement. Il s’y attendait d’être libéré rapidement de toute façon. Aux yeux des autres, il avait été attaqué et pas eux. Kyou n’eut, cependant, pas le temps de soupirer de soulagement avec la déclaration. « Votre carte d’identité. » Oh. Son ID, évidemment, tout de suite. Le brun porta sa main à son arrière-poche et ... « Hein ? » Il vérifia à plusieurs reprises. Non. Impossible. Il ne l’avait pas fait tomber. Il l’avait oublié ? Pris d’un rire nerveux qu’il retint, il fixa son bourreau du monde qui l’abandonna rapidement. Et merde. C’était possible d’avoir autant de poisse ? Quelque chose n’allait pas. Déjà qu’il faisait une connerie et maintenant, il oubliait ses affaires ? Putain ...

Heureusement, on lui accorda un appel pour qu’il prévienne un proche qui se charge de venir le chercher. Dans ce genre de situation, il n’y avait vraiment que lui pour le sauver après tout. Ne sachant pas trop comment lui expliquer, ni comment, faire assez court et pas super angoissant. Il fallait juste faire simple. Bip. « Frangin. On m’a enlevé. Viens me chercher. » Avant de lui donner l’adresse et de raccrocher aussitôt après. Ouais. ça devait être parfait de la sorte. Ou peut-être un peu de trop. On le ramena assez vite en détention. Il lui manquait juste l’harmonica et il serait parfait. Akiya avait intérêt de se dépêcher. C’était un peu trop sale ces endroits ... Kyou avait presque peur de s’adosser au mur. Puis ses gants puaient le sang de l’autre. Ouais ... c’était super.

Akiya faisait la queue dans une boulangerie qu'il venait tout juste de  découvrir. Elle était plutôt petite néanmoins, très chaleureuse. Il posa son index en dessous de ses lèvres, faisant mine de réfléchir à ce qu'il allait prendre. Tous ces petits pains lui mettaient l'eau à la bouche. Cependant, l'agent n'avait pas assez d'argent sur lui pour tous les prendre. De plus, ce n'est pas très équilibré. Une fois que le tour d'Akiya arriva, il adressa un léger sourire à la vendeuse. Par la suite, il commanda ce qui lui donnait le plus envie : un pain à la myrtille. Rectification, deux pains à la myrtille. Ce dernier pensa sur le coup à son petit frère, Kyou. Il se disait qu'il pourrait passer le voir aujourd'hui.

Une fois sortie de la boutique, deux paquets à la main, Akiya essaya de sortir son téléphone de sa poche pour contacter le cadet. Il voulait lui demander à qu'elle heure il serait libre pour passer le voir.
Son téléphone, dans ses mains, vibra. Cela voulait dire qu'il y avait un appel et Akiya arqua un sourcil. En effet, il fut surpris de voir que Kyou était entrain de l'appeler. Peut-être que le petit frère eut la même idée que son aîné ? Celui-ci répondit à l'appel et lâcha un simple « Allo ? ». Le cadet donna une adresse -qui était celle du commissariat- et dit une seule phrase à une vitesse phénoménale pour ensuite raccrocher. Akiya était dans l'incompréhension la plus totale. « Mais qu'est-ce qu'il fiche là-bas ? ». Il se dirigea vers le commissariat qui n'était pas si loin de la boulangerie. Son pas était de plus en plus rapide et il se mit aussitôt à courir. Il faut l'avouer, Akiya se fait du souci pour son frère. Un peu trop d'ailleurs. Il se souci trop de Kyou, qu'il ne fit pas attention en traversant la route. Une  voiture fonçait droit devant. Elle s'arrêta et le conducteur klaxonna de colère. Akiya s'excusa toujours en sprintant comme un fou. Ce dernier avait, d'ailleurs, toujours son téléphone à la main ainsi que ses deux petits paquets.

Une fois arrivé à l'endroit voulu. Akiya s'arrêta de courir et reprit son souffle. Il se dirigea vers l’accueil et comme d'habitude, il y avait un monde fou. Il avait du attendre au moins une vingtaine de minutes pour que cela soit enfin à lui. L'agent ne savait pas du tout ce qu'avait Kyou et demanda innocemment à la personne de l’accueil ou était son frère en lui donnant son nom puis sa description physique. On lui répondit que le cadet était en détention et Akiya lâcha un petit juron. Il demanda s'il pouvait récupérer son frère. Pour cela, il montra sa carte d'identité et la personne de l’accueil rit en la voyant. Akiya était très fière de sa photo. Il avait une si belle tête sur cette dernière. Bien sur, c'est de l'ironie. Il avait les yeux mis clos, les cheveux en bataille, et si on regarde bien, un filet de bave pouvait couler de sa bouche. Il n'était pas du tout réveiller quand il avait fait la photo et c'était la seul qui lui restait. Après que "l'autre" finit de rire, il lui répondit que son cher frère allait arriver d'un moment à l'autre.

Kyou jouait avec ses mains comme un parfait gamin qui n’avait trouvé rien de mieux à faire ... ce qui était un peu le cas, en fait. Il voulait vite rentrer. Il voulait vraiment rentrer. Il voulait absolument rentrer. Il voulait tout de suite maintenant sur le champ rentrer. Heureusement, il n’eut pas le temps d’essayer tous les adverbes possibles pour exprimer son ennui que la cloche de la liberté tinta. Il aurait presque sauté sur place et fait un bond en avant s’il ne craignait pas de se prendre le sol en faisant ça ... Et seigneur, qui sait ce qui se trouve par terre. Il n’osait même pas regarder plus bas.

Un policier -très sympathique, vint lui passer des menottes avant de le sortir de la cellule. Kyou soupira. Mais bon dieu. Il n’était pas un criminel. Son frère avait du leur parler, non ? Ou alors, ils aimaient tant que ça menotter les gens ? Chelou ... Lui, n’avait pas de délires sm, malheureusement. On le traîna rapidement vers l’extérieur. C’était ce sentiment qu’avait les prisonniers en retrouvant leur liberté ? Bon. Certes, lui était resté à peine deux heures, mais il devait s’avouer qu’il se sentait beaucoup mieux, une fois, loin de la cellule. Kyou s’était rapidement trouvé à la salle d’attente alors qu’on lui enlevait les bracelets de fer.

Il chercha son frère du regard, tâche qui ne fut pas très compliquée, en vrai. Il aurait pu profiter du fait de pouvoir bouger ses mains librement, et il avait trouvé le meilleur moyen de le faire. Il s’était un peu transformé en con qui sautait sur son fraternel pour le câliner. Vous savez les réunions un peu dramatiques qu’on voit dans les séries .. C’était pareil mais avec les larmes en moins. Le contact dura à peine quelques secondes avant que le plus jeune ne s’en sépare en plantant son regard dans celui du bleuté. « ... T’as mis trop de temps. »

Kyou n’était pas de nature capricieuse, mais il aimait déranger son frère ; Il y trouvait un plaisir qu’il ne pouvait avoir nulle part ailleurs. C’était un peu le petit frère gâté dans sa tête, et il ne s’en gênait pas pour le montrer. Il ne lui laissa pas trop le temps de répondre qu’il le traîna déjà dehors. « J’ai même plus envie d’approcher ces endroits, sérieusement. » Il put finalement se passer une main dans les cheveux ; chose qui le démangea depuis qu’il avait des menottes. Ce n’est qu’à plusieurs mètres plus loin de l’établissement qu’il se reprenait un peu.

« Hey ... Désolé de t’avoir fait venir jusque là. J’ai merdé sur ce coup. » Il se gratte l’arrière du crâne, embarrassé, malgré lui alors qu’il évite le regard du plus âgé. C’est le moment où il se fait gronder, non ?

Akiya le voyait. Il voyait son frère arriver, menotter. Kyou le cherchait du regard, qu'il trouva facilement. Dans les  yeux de l'aîné, il y avait un mélange de colère mais à la fois de joie. D'une part, il était en colère de l'attitude de son frère. Mais qu'est-ce qu'il fiche ici, il s'est mis dans quelle histoire encore ? Cependant, d'une autre part, il était heureux de voir son frère sain et sauf.
Le cadet, qui trouva l'accès, sauta sur son frère pour ensuite le câliner. Ce dernier fit de même et lui tapota le dos qui signifiait que tout était fini. L'étreinte des deux fraternels se rompit quelques secondes plus tard.

Comment ça, trop de temps ? Pardon ? Excusez-moi ? J'ai du mal entendre. Vite, SOS, Akiya est en mode hors ligne. Effectivement, la phrase de Kyou ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout. Il savait très bien que c'était juste pour le taquiner. Mais après avoir couru comme un fou, presque à se faire écraser par une bagnole enrager. Non. C'était de trop. Akiya regarda son petit frère méchamment et se contenta de ne rien. Kyou connaissait ce regard, et il savait parfaitement qu'il allait en prendre plein la tête.
Ces endroits ? Pourquoi, t'étais-tu fait attaquer ? Akiya se posait trop de questions. Beaucoup trop. Oui, Kyou c'était fait attaquer par des voyous au QI d'un pigeon. Une petite histoire de bousculade sans queue ni tête. Une histoire stérile comme dirait la mère des deux enfants. Et cela avait fini en bagarre générale. Que c'est beau. Que c'est beau d'en revenir avec des bleus, la lèvre en sang. Et surtout. Oh oui, surtout. Avec la police. Mais ça, Akiya n'en était pas au courant et il fallait bien que le fraternel le lui expliquer avec qu'il ne le tue.

C'est bien joli de s'excuser, et de faire une tête toute cutie. Mais là, Akiya doit se placer où ? Le disputer jusqu’à que le cadet finisse à genoux en pleurant ou bien faire encore un big hug et de se dire que tout était oublié. Non, c'est trop facile ça. A la place, Akiya tendit l'un des paquets contenant la fameuse friandise. « Tu vois ce jolie paquet ? Il était pour toi. » Le grand frère le lécha et croqua dedans pour montrer que c'est maintenant son territoire. Il fit de même avec l'autre friandise dans l'autre paquet et sortit un bon "miam" juste pour le plaisir de le narguer.

Il regarda on frère avec un regard des plus joueurs mais revient vite très sérieux. Akiya prit son index pour ensuite mettre, un plein milieu du front de son frangin, une belle et horrible pichenette. « C'est ta deuxième punition. » et pas la dernière. Alors maintenant, explique lui, fais lui comprendre ce qu'il c'est passé.